Or, disons-le : l’art est aussi inutile que nécessaire, aussi gratuit que libre-penseur.

Formatages et fourches caudines, écoles homologuées et cotes assignées sur le marché, tuent l’art. L’art fuit les -ismes, préférant Dada au dadaïsme, l’anarchie à l’anarchisme. L’art académique, cet oxymore, n’est qu’une grosse bouée. L’art révolutionnaire ne sera jamais au service de la révolution.

L’art est la libre expression de notre humanité, sa signature, et le seul pardon quelle pourra s’accorder.

Extraits :

BONJOUR… JE T’AIME…

Bon jour quand m’aime

l’amour de ma vie.
Quand je t’ai me combles

de je t’aime. Je t’aime !
Nous partageons tout

les je t’aime et les bonjours

et même tous les autres jours.

NOCTURNE NUMÉRIQUE

Battant à cent vingt à la noire nuit sans étoiles,

la musique en boucle sans musiciens,

avec ses quatre temps sans batteur

et sa chanteuse au vibrato sans voix,
gravite… au-dessus de tête-à-tête sans conversation,
vibrants de messages en absence sans contact,

à commander des boissons sans calories,

échanger des rires sans éclat…
afin de combler machinalement sans fin

le vide sidéral qu elle crée sans appel.

HARMONICA

J’ai sorti de ma poche trouée :
le cor de Roland et la rose de Ronsard,
la corde du pendu de Villon, elle oscille encore,
le luth constellé de Nerval, d’où s’envolaient des papillons,
l’albatros de Baudelaire, la louve de Du Bellay,
les violons de Verlaine au vent mauvais,
la cigale de La Fontaine – cri, cri, cri, et le hareng saur de Charles Gros;
la terre d’Eluard, bleue comme une orange dans la voie lactée de Hugo,
le verre brisé d’Apollinaire comme un éclat de rire,
le A noir des voyelles de Rimbaud,
la lyre lavée par Tristan Corbière, drôle en sa sauce jaune,
la nuit de décembre de Musset,le jour de lessive de Gaston Coûté,
le canif de Lautréamont et la main de Desnos dans la mienne;
la tasse à café de Prévert sous le chapeau de l’infini d’Aragon,
la Liberté Dada, Dada, Dada de Tzara,
la gidouille de Jarry, le joli scooter de Vian,
le piano du pauvre de Ferré et l’accordéon solo
de Brassens chantant son ami Léon.
Et je me suis essayée à mon art
monica.